QUI RÉSISTERAIT À L'IDÉE D'ALLER SE BALADER DANS LES VOSGES, COURIR, MARCHER, MANGER, DISCUTER EN DESSINANT DES PÉTALES AUTOUR D'UN SOMMET, BAIGNÉ DU SOLEIL D'OCTOBRE ? PAS MOI EN TOUT CAS, SURTOUT QUAND CELA CONSTITUE LA PREMIÈRE PARTIE D'UN WEEK-END AXÉ COURSE. SUIVEZ LE TOURISTE !
L'Est ne serait pas si loin ? Vu de Paris ou de ses environs, les Vosges ne sont tout de même pas à côté. Que l'on voyage en voiture ou en train, il faut compter en grosse demi-journée en cette fin de mois d'octobre avant de rejoindre Mulhouse. Dès la mi-décembre, les nouveaux aménagements de voies TGV rapprocheront un peu plus ces deux villes... plus rien ne vous empêchera d'y aller en train. Pour mon compte, l'aller-retour d'une douzaine d'heures porte-à-porte m'oblige à préférer un week-end choc. Alors quand Didier Petitjean propose un doublé « off le samedi plus course le dimanche » sur le forum Utrafondus, je saute sur l'occasion. Je connais déjà Didier pour l'avoir côtoyer de nombreuses heures lors de mon premier gros off... c'était déjà dans les Vosges, en juin 2007. En grande partie de nuit (évidemment, avec un départ à 22 h) et malgré la période estivale, la météo ne nous avait pas permis de profiter les paysages, même pendant la journée. Malgré les conditions et les difficultés pour mon niveau, j'avais été conquis par l'accueil, les sentiers, les échanges et les repas. C'est aussi ce même Didier qui avait proposé un bel enchaînement l'année passée avec le Grand raid 73 et le trail des Allobroges le lendemain... bref, Didier a toujours de bonnes idées et malgré sa propension à cultiver un air d'ours mal léché (auquel personne ne croit plus), il me tarde de retrouver sa compagnie, ainsi que celle de ses acolytes qui assureront la bonne humeur toute la journée.
Cette journée est partagée entre Ultrafondus et le Club alpin français de Mulhouse, histoire de grossir un peu les rangs. Nous nous retrouvons donc à sept en ce beau matin d'octobre sur le petit parking de Steinbach, au pied du Molkenrain, dont Didier nous propose une visite en quatre pétales, une cinquantaine de bornes et environ 3000 mètres de dénivelé positif. J'avais subtilement (sic !) émis l'idée d'une visite d'une ferme-auberge mais cette option n'est pas encore au programme lorsque l'on démarre notre périple... mais je ne perds pas espoir. Le soleil prévu tout le week-end ne parvient toutefois pas à percer la brume, avec une petit peu de gelée en ville et l'humidité ambiante, nous n'aurons pas trop chaud de toute la journée. La première montée permet de faire connaissance et de se mettre dans le bain. L'heure est au profit : le regard s'aiguise, les sens se réveillent pour capter et garder toutes ses sensations qui mises bout à bout vaudront bien un week-end passé loin de la famille. Les sentiers très bien entretenus et balisés (les amis de la nature du Vieil-Armand font un boulot épatant), ainsi que la mémoire visuelle de Didier nous permettent de nous balader sans crainte de faire des rallonges. Il est de toute façon impossible de se perdre ici, et à moins de le faire exprès, nous aurons toujours un sentier sous les pieds. Nous sommes montés pour mieux redescendre, c'est le thème de la journée. Le passage au ras du sommet, dans la gelée blanche et baignés de soleil est un régal... le passage au ras de la ferme-auberge sans un seul regard aux spécialités proposées un peu moins, mais j'ai toujours confiance : on finira bien par s'arrêter quelque part. Nous abordons ensuite une autre dimension, historique cette fois. Après avoir passé quelques panneaux retraçant les batailles de 14—18, nous entrons dans le vif du sujet avec un passage particulièrement fort : la montée de la tranchée de l'échelle du ciel (lire l'encadré). Nous sommes heureux de la prendre en montant, tant les marches recouvertes de feuilles sont glissantes... Nous continuons notre remontée dans le temps en longeant le cimetière militaire avant de retrouver notre cheminement pour le moins futile après ces pensées guerrières, en quête de nature.
Après un nouveau passage tout près du sommet du Molkenrain et pour nous remettre de nos émotions (les quatre pétales qui se transforment allégrement en cinq boucles), nous remportons un arrêt rapide dans la ferme-auberge Ostein des plus rustiques. Le feu dans le poêle n'est prévu que le lendemain, il n'y a pas de plats chauds proposés ni de tarte aux myrtilles, mais une boisson suffira à nous requinquer, avant de continuer notre descente et de repasser devant cette ferme à la remontée, qui se terminera au Rocher, après un passage droit dans le pierrier, à la recherche plus ou moins nonchalante d'un sentier qui ne nous manque pas : c'était la séquence rigolade de la montée. Le soleil est bien présent et nous chauffe pendant notre pause à ce sommet, avant de se laisser filtrer par les arbres quand nous pénétrons de nouveau dans la forêt. Nous remettons une petite couche supplémentaire dans la descente, la fraîcheur de la fin de journée reprend ces droits. Une piste forestière plus loin et nous entamons notre dernière côte, déjà. Courte et bien régulière, elle est avalée par tous les membres de notre équipe en un rien de temps... on en serait presque à regretter une sixième « face ». Enfin, cette idée ne reste pas longtemps dans mon cerveau, le programme du lendemain se charge de calmer mes ardeurs. Nous finissons cette journée en forêt par un sentier comme Didier les affectionne : glissant, rocailleux et en descente bien sûr, pour rejoindre notre petit parking. Un repas digne des Gaulois de bande-dessinée viendra clore cette belle journée de course, à la découverte d'une petite partie de ce beau massif des Vosges, alternant montées et descentes, fonds de vallée et vues dégagées, pistes et mono-traces, si loin des nuisances de la civilisation, en plongeant pourtant si près de ce que nos ancêtres ont dû enduré pour nous le permettre.